En effet, les marchands commencent à s’organiser et fixent leurs entrepôts à proximité des châteaux des seigneurs féodaux. La garantie de leur sécurité est une condition indispensable au développement économique aussi, ils entreprennent la construction de remparts en bois où sont érigées des tours de guet. A partir de là, la préoccupation majeure de ces marchands est de pouvoir organiser et administrer eux-mêmes leur cité. Ils se constituent en association (ghilde, carité, frairie ou hanse) et sollicitent des droits et privilèges auprès de leur suzerain.

 

Acquis sous la contrainte ou plus souvent chèrement payés, ces privilèges sont détaillés dans une charte de franchise  communale. Ce document, garant de leur autonomie administrative, judiciaire et commerciale, sera par la suite précieusement conservé. Les bourgeois élisent des magistrats appelés échevins avec à leur tête le mayeur, ancêtre de notre maire actuel. Les seigneurs ont tout intérêt à voir le commerce prospérer. La renommée de l’industrie lainière et drapière entraîne des échanges commerciaux en nette croissance, marchés et foires se multiplient. Cette situation profite aux riches communes qui peuvent acheter des privilèges et au seigneur qui touche le tonlieu, impôt prélevé pour l’étalage des marchandises sur les marchés.

 

Ces communes s’apparentent alors à de véritables seigneuries populaires, elles cherchent à posséder les apparences matérielles de leur nouveau statut. L’autonomie communale n’est pas suffisante, elle se doit d’être perçue par tous à travers l’obtention d’autres privilèges. L’autorisation de construire un beffroi permet de marquer architecturalement le paysage et les échevins vont se lancer dans la construction de tours sans cesse plus hautes afin de rivaliser le plus dignement possible avec le donjon du seigneur local ou le clocher de l’église. Ce droit de beffroi est indépendant de l’autonomie communale, ainsi, une cité peut avoir un beffroi sans être une commune autonome et inversement. Il en est de même pour les droits de cloche, de sceau, de halle ou encore de loi. Le droit de cloche est un privilège onéreux puisqu'il permet de s’affranchir de l’autorité féodale ou religieuse pour l’organisation de la journée. La cloche sonne le début et la fin de la journée de travail et le couvre-feu mais surtout, elle permet de mobiliser rapidement la population en cas de danger (attaques, incendies...) ou de révolte.

 

Le beffroi devient alors peu à peu le lieu de concentration de tous les privilèges de la commune. Les étages de la tour remplissent toutes les fonctions de cette nouvelle entité. On y trouve une salle de réunion échevinale ou est également rendue la justice, des cachots, une salle du trésor où sont entreposés la charte, le trésor et le sceau de la ville. Une bretèche, sorte de balcon, permet aux échevins de s’adresser à la population pour les grandes proclamations et les rendus de justice. Plus haut, une salle renferme les cloches servant à rythmer la vie de la cité et un chemin de ronde permet aux guetteurs de surveiller les alentours.